L’alibi scandaleux
Journal l’audace
Mars 2010
Salah Ben Salah a été ressuscité de manière inattendue et casuelle par ces courants, qui ignoraient jusqu’à son existence en janvier 2011. Portés par leur volonté de détruire la symbolique avant-gardiste incarnée par Bourguiba, les islamistes d’Ennahdha ne pouvaient pas personnifier la légitimité historique pour le faire seuls. Ils ont donc décidé de recourir à un « suppléant » historique, en la mémoire de Salah Ben Youssef. Ainsi, ils allaient pouvoir rallumer le feu et dresser à nouveau le sud contre le nord de la Tunisie. Un levier historique de substitution a ainsi été activé, contre l’emblématique moderniste bourguibienne. Salah Ben Youssef doit se retourner dans sa tombe ; lui qui n’a jamais eu la moindre accointance avec l’islam politique combattant incarné par les Frères musulmans, qui n’avaient rien de commun avec lui. Il avait été un nationaliste arabe d’adoption, « pour les besoins de sa cause ». D’ailleurs Jamel Abdelnasser, dont il s’était rapproché, était celui-là même qui avait fait prendre haut et court le 26 août 1Kulb l’un des chefs de la Confrérie et successeur de Hassen El Banna. Il voulait instaurer en Egypte et dans les autres Etats arabes un régime théocratique, fondé sur le Coran et la Charia, avec pour mot d’ordre : « le Coran est notre Constitution ». Comme quoi l’histoire peur bégayer aussi ! Bien que les descendants de Salah Ben Youssef aient unanimement déclaré qu’ils refusaient que le nom de leur aïeul soit instrumentalisé contre Bourguiba, Ennahdah, ses satellites et consort ont fait commerce de Salah Ben Yousef pour leurs propre « boutique » politique. Un alibi scandaleux qui – en dépit de tous les efforts de manipulation et d’appropriation – a échoué. Les tunisiens sont loin d’être un peuple d’ignares. Et ça, ils le doivent précisément à… Bourguiba ! Messieurs les manipulateurs…